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Franc CFA plus fort que le Naira ? Une réalité qui change les équilibres régionaux.

Le franc CFA a beau être perçu comme une monnaie faible face à l’euro ou au dollar, il n’est pourtant pas au bas du classement africain. Dans la réalité des taux de change, il surpasse nettement certaines devises du continent, dont le Naira nigérian.

Prenons un cas concret. Lorsqu’un Nigérian traverse la frontière pour se rendre au Bénin, il subit une perte de pouvoir d’achat considérable. Avec 30 000 naira, il ne récupère que 10 000 francs CFA. Ce déséquilibre se répète dans l’ensemble de la zone UEMOA, qui regroupe huit pays : Bénin, Togo, Niger, Burkina Faso, Sénégal, Mali, Côte d’Ivoire et Guinée-Bissau.

Autrefois, le Nigéria attirait une main-d’œuvre étrangère, notamment béninoise. Des milliers de travailleurs, en particulier dans le bâtiment, franchissaient la frontière pour gagner des naira et soutenir financièrement leurs familles restées au pays.

Mais la tendance s’est inversée. Une habitante nigériane témoigne de ce basculement : « Avant, le naira avait plus de valeur que le franc CFA. Aujourd’hui, ce sont les Nigérians qui cherchent du travail au Bénin. »

Ce changement illustre à quel point la valeur d’une monnaie peut bouleverser les dynamiques économiques et sociales. Plus une devise perd en force, plus le pays devient moins attractif pour la main-d’œuvre étrangère. À l’inverse, un pays dont la monnaie garde une certaine stabilité devient un nouveau pôle d’opportunités.

La fragilité des monnaies africaines face aux devises occidentales explique aussi pourquoi tant d’Africains rêvent d’Europe ou des États-Unis. Pour un Béninois ou un Togolais, 1 524 euros ou 1 764 dollars représentent un million de francs CFA. Une somme importante dans leur pays d’origine, ce qui alimente l’illusion d’un enrichissement plus rapide à l’étranger.

Cette réalité nourrit les départs vers le Nord, motivés autant par l’écart de richesse que par la différence de pouvoir d’achat.

Face à cette instabilité monétaire, les dirigeants ouest-africains cherchent à reprendre le contrôle. Le Nigéria, par exemple, a lancé un programme ambitieux de rachat d’or pour renforcer ses réserves et donner plus de poids à sa monnaie.

Plus largement, les pays membres de la CEDEAO travaillent depuis plusieurs années à la création d’une devise commune : l’« Eco ». Son lancement, prévu d’ici 2027, vise à unifier les économies régionales et renforcer leur indépendance face à l’euro et au dollar.

Si ce projet voit le jour, les populations de la sous-région pourraient bénéficier d’une plus grande stabilité monétaire et d’une meilleure intégration économique.

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