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Israël : le Premier ministre Netanyahu peine à capitaliser politiquement sur la guerre contre l’Iran.

Malgré une adhésion populaire massive aux frappes israéliennes contre l’Iran, l’avenir politique de Benyamin Netanyahu demeure incertain. L’opération militaire, lancée le 13 juin et prolongée durant près de deux semaines, s’est déroulée dans un contexte personnel et institutionnel tendu pour le chef du gouvernement israélien.

Engagé depuis des années dans une bataille judiciaire pour corruption, et sous le coup d’un mandat de la Cour pénale internationale en lien avec la guerre à Gaza, Netanyahu affronte une pression croissante. Si les frappes contre l’Iran semblaient lui offrir un répit politique, rien n’indique pour l’instant que cette offensive suffira à redorer son image ou à renforcer sa majorité.

Une enquête menée par un institut de sécurité israélien montre que 73 % de la population soutient les frappes, jugées principalement motivées par des considérations sécuritaires. Toutefois, seuls 9 % pensent que la menace nucléaire iranienne a été éradiquée. Pour près de la moitié, elle a été seulement atténuée, et une part non négligeable doute de toute réelle réduction. L’armée israélienne a diffusé en continu des images des bombardements, alors que des missiles iraniens tombaient également sur des zones habitées en Israël. Malgré ces violences, responsables de la majorité comme de l’opposition ont défendu l’opération, justifiant son coût par la nécessité de contenir un danger existentiel.

Sur le plan politique, le Premier ministre a brièvement vu sa cote remonter. Le Likoud, son parti, a progressé dans les intentions de vote, passant de 22 à 27 sièges selon Maariv. Pourtant, cette embellie reste insuffisante pour garantir la formation d’une majorité parlementaire. Même avec le soutien renouvelé d’une partie de la droite, Netanyahu ne dispose pas des 61 sièges nécessaires pour gouverner seul. Un autre sondage, publié par Channel 12, crédite le Likoud de 26 sièges, légèrement devant le nouveau parti de Naftali Bennett. Avant le conflit, ce dernier dominait les sondages. Malgré cette remontée, l’opposition continue d’exiger des élections anticipées, rejetées par Netanyahu tant que le pays reste en guerre.

Si la classe politique israélienne a salué les résultats militaires, elle a soigneusement évité de les attribuer à Netanyahu. Dans son discours, ce dernier a revendiqué une « victoire historique » contre l’Iran, affirmant avoir neutralisé une menace pour les générations futures. Mais selon plusieurs analystes, ces affirmations pourraient s’avérer précipitées. D’après des fuites aux États-Unis, les frappes israéliennes n’auraient pas porté de coup décisif au programme nucléaire iranien. Pour beaucoup, le bilan réel de l’opération reste à évaluer. Le commentateur militaire Ron Ben-Yishai souligne les zones d’ombre : les dégâts exacts causés aux installations iraniennes sont encore inconnus et Téhéran semble avoir conservé d’importantes capacités, notamment en matière de missiles de croisière et de drones.

Des observateurs estiment que cette guerre pourrait ouvrir la voie à un accord plus strict entre Washington et Téhéran, sous l’impulsion de Donald Trump. Mais les risques d’impasse demeurent élevés, les Iraniens étant coutumiers des manœuvres dilatoires. Certains évoquent un pacte tacite de non-agression « silence contre silence » mais la fragilité d’un tel arrangement pose question. Israël pourrait-il répondre à une future activité nucléaire iranienne sans relancer les hostilités ? Que faire des stocks d’uranium hautement enrichi déjà accumulés par l’Iran ?

Netanyahu, tout à sa mise en scène d’une victoire sur l’Iran, reste confronté à l’enlisement de la guerre à Gaza. L’absence de solution politique, les pertes civiles et le sort toujours incertain des otages minent la crédibilité de sa stratégie militaire. Amos Harel, du Haaretz, estime que le conflit avec l’Iran n’a fait que geler temporairement les ambitions nucléaires de Téhéran. Il critique par ailleurs la gestion de Gaza, qu’il qualifie de « plaie béante », dénonçant une opération inefficace et coûteuse.

Dans un éditorial, Maariv appelle à la prudence face aux déclarations triomphantes. Le journal rappelle que le programme nucléaire iranien n’a été que partiellement perturbé, et que les dirigeants politiques prennent des libertés avec la réalité. L’offensive israélienne a tué plus de 600 Iraniens, blessé des milliers d’autres, et visé des cibles militaires, nucléaires et civiles. L’Iran a répliqué par des frappes sur le territoire israélien, causant 28 morts. Les États-Unis ont également frappé des installations iraniennes, avant que l’Iran ne vise à son tour une base américaine au Qatar. Le cessez-le-feu annoncé le 24 juin par Washington a mis un terme temporaire aux affrontements. Mais sur le plan intérieur, rien ne garantit à Netanyahu que cette guerre lui assurera un avenir politique plus stable.

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