En l’espace de quelques jours, le colonel Michaël Randrianirina est passé d’homme de l’ombre à figure centrale de la transition politique à Madagascar. Ancien gouverneur, officier formé à Antsirabe et brièvement détenu en 2024, il est désormais à la tête du Conseil de défense nationale de transition (CDNT), après l’exfiltration du président Andry Rajoelina par la France.
Originaire de la région d’Androy, dans le sud du pays, le colonel Randrianirina est un officier du CAPSAT, le Corps d’armée des personnels et services administratifs et techniques. Formé à l’Académie militaire d’Antsirabe, il s’était illustré ces derniers mois pour son soutien implicite aux mobilisations citoyennes, sans jamais s’aligner officiellement sur une ligne politique.
En 2024, il avait été incarcéré brièvement avant de retrouver son poste à la suite d’un séjour à l’hôpital militaire de Soavinandriana. Peu après, il réapparaît sur le devant de la scène lors des manifestations du mouvement citoyen Gen Z, où il appelle publiquement les forces de sécurité à ne pas faire usage de leurs armes contre les manifestants. Un geste qui lui vaut une popularité soudaine, malgré ses déclarations de neutralité.
Jusqu’à récemment, le colonel Randrianirina se défendait de toute ambition politique. Dans un entretien accordé à Jeune Afrique et RFI, il assurait n’avoir aucun contrôle sur l’armée, déclarant que le pouvoir restait entre les mains du chef d’état-major. Face aux accusations de coup d’État lancées par le président Rajoelina, il maintenait que l’armée avait simplement répondu à l’appel du peuple.
Mais le 14 octobre, tout bascule.
L’Assemblée nationale vote à une écrasante majorité une motion d’empêchement contre le président Rajoelina, invalidant sa tentative de dissolution du Parlement. Le président est exfiltré par la France, affirmant cependant ne pas avoir quitté ses fonctions. Le vide institutionnel devient alors manifeste.
Le lendemain, le colonel Randrianirina se présente au palais présidentiel. Devant les caméras, il annonce :
« On est ici pour prendre le pouvoir. La crise a assez duré. Nous allons assumer nos responsabilités. »
Il proclame la création d’un Conseil de défense nationale de transition, composé de cinq officiers issus de l’armée, de la gendarmerie et de la police.
La Haute Cour constitutionnelle valide cette prise de pouvoir en déclarant la vacance de la présidence et du Sénat, et invite le colonel à exercer la fonction présidentielle par intérim. La transition militaire prend ainsi un cadre juridique, même si plusieurs voix continuent de dénoncer un coup de force.
Le colonel Randrianirina assure que cette transition ne concerne que la fonction présidentielle. Un gouvernement civil provisoire sera nommé dans les prochains jours pour assurer les affaires courantes. L’Assemblée nationale reste en place, mais plusieurs institutions sont suspendues : le Sénat, la Commission électorale (CENI), la Haute Cour de justice et le Haut Conseil pour la défense de la démocratie.
La Haute Cour constitutionnelle a fixé une durée maximale de deux ans pour la transition, avec des élections présidentielles à organiser entre 30 et 60 jours. Le colonel affirme vouloir restaurer la stabilité, rétablir la légalité républicaine et préparer une réforme constitutionnelle.




